Entretien avec Francis Jérôme, directeur de Transitions Pro Bourgogne-Franche-Comté : Lutter contre l’usure professionnelle : tout comprendre sur le PUR et le FIPU
Face à l’allongement des carrières et à la montée des risques liés à la pénibilité, deux nouveaux dispositifs, le PUR et le FIPU, offrent aux salariés exposés la possibilité de se reconvertir avant que leur santé ne soit compromise. Francis Jérôme, directeur de Transitions Pro Bourgogne-Franche-Comté, nous en explique l’intérêt et les conditions d’accès.
Apecita Média : En matière de reconversion professionnelle, deux nouveaux dispositifs, le PUR et le FIPU, ont vu le jour. Pourquoi ont-ils été créés ?
Francis Jérôme : Ils sont nés d’un constat simple : certains métiers exposent à une usure professionnelle importante, et attendre l’inaptitude médicale pour agir, c’est déjà trop tard.
La réforme des retraites de 2023, qui s’est notamment traduit par l’allongement des carrières de deux années supplémentaires, a donc prévu des mesures spécifiques pour faciliter la reconversion de ces salariés. L’idée est de leur permettre, grâce à une formation, de se tourner vers un métier sans risque pour leur santé, avant que la pénibilité ne les empêche de travailler.
Apecita Média : Concrètement, en quoi consistent ces dispositifs ?
Francis Jérôme : Le dispositif Prévention Usure Reconversion (PUR) repose sur le Compte Professionnel de Prévention (C2P). Les salariés accumulent des points en fonction de leur exposition à six facteurs de risque (travail de nuit, travail répétitif, etc.). Ces points financent ensuite, en partie, leur reconversion professionnelle.
Le Fonds d’Investissement pour la Prévention de l’Usure professionnelle (FIPU), lui, cible trois autres facteurs de risque non couverts par le C2P, comme le port de charges lourdes ou les vibrations mécaniques. Il dispose d’une enveloppe nationale de 200 millions d’euros par an pendant 5 ans, dont 40 millions dédiés à la reconversion via Transitions Pro.
Les deux dispositifs1 poursuivent le même but : permettre aux salariés exposés de changer de métier, par la formation certifiante, avant que leur santé ne se dégrade. Nous privilégions les formations courtes, de 3 à 12 mois maximum, pour faciliter un retour rapide à l’emploi. Le financement couvre le salaire, les frais de formation et les frais annexes, comme pour un projet de transition professionnelle classique.
Apecita Média : Comment un salarié peut-il y accéder à ces dispositifs ?
Francis Jérôme : Pour le PUR, c’est obligatoire : le salarié doit rencontrer un conseiller en évolution professionnelle (CEP). Celui-ci l’aide à :
- Vérifier son éligibilité, en fonction de ses points C2P car le salarié doit pouvoir financer son projet via son C2P, à hauteur de 15% minimum ;
 
- Construire son projet de reconversion vers un métier sans facteur de risque ;
 
- Monter le dossier sur la plateforme Transitions Pro.
 
Pour le FIPU, la démarche est un peu différente : pas d’obligation de passer par un CEP, mais nous le recommandons fortement. Autre point : l’employeur doit financer 5 % du coût de la formation. C’est une petite contribution, souvent quelques centaines d’euros, qui permet aussi d’impliquer l’entreprise dans la démarche, à un coût largement moindre que ce pourrait impliquer une future inaptitude de son salarié.
Apecita Média : Changer de métier, cela signifie-t-il forcément changer d’entreprise ?
Francis Jérôme : Pas toujours. Le salarié doit viser un métier sans facteur de risque, mais il peut rester dans la même entreprise si un poste adapté existe. Par exemple, un ouvrier agricole pourrait se reconvertir en assistant comptable ou en gestionnaire RH dans la même structure. L’essentiel, c’est le changement de métier, pas le changement d’employeur.
Apecita Média : Ces dispositifs sont récents. Sont-ils déjà utilisés et surtout assez connus ?
Francis Jérôme : Oui, et même beaucoup plus vite que prévu ! Dès leur lancement au printemps 2024, nous avons multiplié les webinaires, les rencontres avec les CARSAT (les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail), les médecins du travail, voire les services RH et les CSE de certaines entreprises pour faire connaître le PUR et le FIPU. Résultat : en Bourgogne-Franche-Comté, près de 80 % de l’enveloppe 2025 est déjà consommée, et certaines régions ont même épuisé leurs crédits dès l’été. C’est la preuve que ces dispositifs répondent à un besoin réel sur le terrain.
(1) Pour l’heure, la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CAT/MP) de la caisse nationale d’assurance maladie réserve les fonds aux salariés du régime général. Des discussions semblent en cours pour élargir ces dispositifs aux salariés du régime agricole.
Transitions Pro en bref
Seul organisme habilité à financer les reconversions professionnelles des salariés du privé, Transitions Pro (anciennement Fongecif) est présent dans toutes les régions. Sa gouvernance est assurée par un conseil d’administration paritaire composé des principales organisations syndicales représentatives des employés et employeurs.
Ses principales missions :
- identifier les besoins en matière d’emploi et de compétences dans sa région,
 
- développer des partenariats avec l’ensemble des acteurs territoriaux en charge de l’emploi et du développement des compétences,
 
- informer et accompagner les salariés vers les partenaires territoriaux (CEP, organismes de formation, France Travail, Apec…),
 
- instruire les demandes, financer et suivre les projets de transition professionnelle au regard de la réalité socio-économique du territoire,
 
- contrôler la qualité des formations dispensées,
 
- conduire des études sur l’emploi et les compétences au niveau régional.
 
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