Biogaz : un levier clé pour la transition énergétique, mais à quel prix ? 

Publié le 20 avril 2025
Temps de lecture estimé : 4 min

Un récent rapport de la Cour des comptes analyse le développement du biogaz en France. Il met en avant son rôle clé dans la transition énergétique tout en pointant les défis économiques et structurels auxquels la filière doit faire face. 

Alors que la France s’est engagée à abandonner le gaz naturel fossile d’ici 2050, le biogaz s’affirme comme un acteur majeur de cette transition énergétique. Ce gaz renouvelable, produit par méthanisation de matières organiques, permet la production d’électricité, de chaleur et, une fois épuré, de biométhane injecté dans le réseau de gaz naturel. Outre son intérêt environnemental, il a démontré son rôle stratégique en matière de sécurité d’approvisionnement lors de la crise énergétique de 2021-2023. 

Une production en forte croissance 

Fin 2023, la France comptait 1 911 unités de méthanisation, principalement agricoles, permettant une production annuelle de près de 12 TWh de gaz et d’électricité. La politique publique a jusqu’ici largement soutenu cette filière avec des investissements massifs. L’objectif fixé dans la prochaine Programmation pluriannuelle de l’énergie est ambitieux : quadrupler la production d’ici 2030 pour atteindre 50 TWh. 

Cependant, cette ambition suscite des interrogations. La Cour des comptes pointe un manque de cohérence dans l’évolution des objectifs entre 2011 et 2024, souvent ajustés en fonction des contraintes budgétaires plutôt que d’une vision à long terme. La baisse future de la consommation de gaz, prévue dans la stratégie de décarbonation, pourrait remettre en question ces objectifs et leur impact sur la gestion des réseaux énergétiques. 

Des coûts élevés pour les finances publiques et les consommateurs 

Le développement du biogaz repose largement sur un soutien public massif. Entre 2011 et 2022, les contrats d’obligation d’achat ont coûté 2,6 milliards d’euros, et les engagements pris jusqu’à 2023 devraient entraîner un coût supplémentaire compris entre 12,7 et 16,2 milliards d’euros pour le biométhane et entre 2,2 et 3,9 milliards pour la production d’électricité. 

D’autres formes de soutien, notamment des subventions de l’Ademe et des exonérations fiscales, ont également été mobilisées. Toutefois, la Cour des comptes souligne que ces aides ne sont pas toujours adaptées à l’hétérogénéité des coûts de production, certaines unités bénéficiant d’une rentabilité excessive. 

À partir de 2026, un nouveau mécanisme, les certificats de production de biogaz, remplacera une partie des aides publiques. S’il permet de limiter l’engagement budgétaire de l’État, il fera porter une partie du coût supplémentaire sur les consommateurs. La Cour regrette qu’aucune évaluation approfondie de l’impact de cette mesure sur les prix du gaz n’ait été réalisée. 

Un enjeu agricole et environnemental 

Au-delà de la production d’énergie, le biogaz présente des atouts pour le secteur agricole et la gestion des déchets. En moyenne, les exploitations agricoles impliquées dans la méthanisation enregistrent une hausse de 20 % de leur excédent brut d’exploitation par rapport aux autres exploitations. Cependant, si la tendance se dirige vers des unités de production non agricoles de grande taille, il sera essentiel de garantir un partage équilibré de la valeur avec les agriculteurs. 

La méthanisation contribue également à la gestion des déchets organiques. Toutefois, la collecte des biodéchets reste faible, limitant leur valorisation. De plus, la question de la disponibilité de la biomasse à long terme suscite des inquiétudes : des tensions d’approvisionnement pourraient apparaître dès 2030. 

Si la méthanisation ne présente pas d’effets négatifs systématiques sur les pratiques agricoles, les experts soulignent l’importance de surveiller l’impact du développement des cultures intermédiaires à vocation énergétique, qui constituent un gisement majeur de biomasse pour l’avenir. 

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