L’IA, un atout de poids pour l’industrie agroalimentaire
Du fait qu’il travaille avec le vivant, une matière première complexe, le secteur agroalimentaire pourrait bénéficier à plein de l’énorme puissance de calcul et de la finesse des analyses de l’intelligence artificielle.
«L’intelligence artificielle (IA) est encore plus pertinente dans les secteurs agricoles et agroalimentaires que dans d’autres, estime Rémi Bellenguez, manager data/IA, agriculture et agroalimentaire, pour le cabinet de conseil en transformation Oresy. Elle modélise des systèmes extrêmement complexes, le vivant donnant lieu à nombre d’informations et d’interactions, qui, en outre,
varient – le taux de protéines du blé évoluant en fonction de la récolte – et à des paramètres très nombreux. »
Reste que, si la puissance de calcul et d’analyse de l’IA permet de prendre en compte toutes ces variables, une tâche difficile pour les humains, les start-up et autres entreprises spécialisées « n’en sont qu’à leurs débuts en matière de fiabilité », tempère Alizée Blanchin, Director and Partner consulting d’Hello Tomorrow, un réseau mondial qui met en relation entreprises et acteurs de la Tech.
Toujours est-il qu’en analysant les données concernant la matière première – fruits, légumes, céréales, lait… – et en documentant le fait qu’une caractéristique ponctuelle peut, par exemple, faire évoluer l’élasticité de la farine ou le temps de cuisson d’un légume, l’IA va permettre au transformateur de réagir pour adapter le produit fini. « L’analyse de données peut aussi indiquer qu’il vaut mieux travailler la matière première le matin quand il fait frais », poursuit Rémi Bellenguez. Certes, l’observation ou l’expérimentation peuvent aboutir aux mêmes conclusions. « Mais en modélisant l’ensemble, l’IA offre la possibilité de reproduire le processus sans erreur et de gagner du temps », dit-il.
Améliorer les processus de fabrication
Et bien sûr, la technologie peut être utilisée pour améliorer les processus de fabrication. Des outils à base d’IA et équipés de capteurs sont ainsi capables de débusquer une mauvaise herbe, comme le datura dans des épinards prêts à être congelés, de vérifier qu’aucun résidu de verre ne se trouve dans un bocal de petits pois et de sélectionner les grains de raisin nécessaires à un grand cru. En outre, grâce à la qualité prédictive de l’IA, des goulots d’étranglement sur la chaîne de fabrication ou des risques de panne des machines peuvent être anticipés. Avec, à la clé, une meilleure gestion des risques et une réduction des coûts.
De même, appliquée à la R & D, l’IA permet de mouliner des milliers de données qui pourront servir à innover, par exemple, pour mettre au point un fromage qui ne soit pas à base de lait mais de végétal.
De plus, comme dans d’autres industries, l’IA peut aussi être utilisée pour alléger les tâches administratives, rationaliser la logistique et gérer la relation client. Dans ce dernier domaine, certains outils à base d’IA utilisent l’« eye tracking ». Des caméras suivent le mouvement des yeux et définissent si le consommateur est davantage attiré par un produit ou un autre, ce qui permet ensuite à la grande distribution d’agir en conséquence.
IA générative
Toujours en marketing, le spécialiste d’Oresys met en avant une nouvelle déclinaison de l’IA : l’IA générative, qui permet de générer des images ou du texte. Ainsi, une marque de vins fins pourra, en fonction du pays d’exportation ou du type d’achat, fabriquer sur mesure une image dans laquelle le consommateur potentiel pourra se projeter.
Mais qu’elle soit mise au service de la formulation des produits et de l’innovation, du processus de fabrication, de la logistique, de l’administration ou de la relation client, l’IA apporte plus encore. « C’est la mise en oeuvre de changements de façon plus rapide », conclut Remi Bellenguez. À plusieurs conditions, cependant. « Dans certains cas, les industriels doivent accepter de partager des années de R & D avec des acteurs extérieurs qui les aideront. Et au-delà de partenariats, parfois public/ privé, entre entreprises et laboratoires de recherche de type Inrae, l’agroalimentaire doit faire collaborer de jeunes ingénieurs sans expérience mais dotés de compétences techniques et des professionnels expérimentés mais sans connaissances sur l’IA », souligne Alizée Blanchin. Le tout pour aboutir, in fine, à une meilleure compétitivité grâce à l’IA.
— Lys ZOHIN (Tribune Verte 3052)
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